Benjamin Bianciotto est docteur en histoire de l’art contemporain de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Il a effectué sa thèse sur les figures de Satan dans l’art contemporain, de 1969 à nos jours. Les liens unissant l’art actuel à la religion et aux sciences occultes demeurent au centre de ses préoccupations et recherches. Il est par ailleurs critique d’art et commissaire d’exposition indépendant (notamment L’homme gris au Casino Luxembourg en 2020 et La Beauté du Diable au Frac Franche-Comté en 2022).
Pierre Molinier : Mouvement - Rythme - Étude
Beaucoup a été dit et écrit sur la portée sacrilège du travail de Pierre Molinier, sur ses fantasmes, fantasmagories et travestissements, sur la dimension sexualisée, scandaleuse et provocatrice de ses photographies.
Pierre Molinier : Mouvement - Rythme - Étude propose une analyse inédite de l’œuvre de Pierre Molinier : formelle, esthétique et musicale. Empruntant son titre au disque que Pierre Henry a dédié au chorégraphe Maurice Béjart, Benjamin Bianciotto examinera de manière approfondie l'œuvre de Molinier dans sa physicalité. Sa méthode, consistant à l’aborder comme une « gymnastique quotidienne du geste et de l’attitude, exercice ascétique et asexué » (1), lui permettra de plonger toujours plus méticuleusement dans la structure essentielle de la pratique de Pierre Molinier et de la débarrasser de son aura érotique ou mystique, pour la dépasser.
Environné des photographies, des peintures, des dessins, des archives et des carnets de l’artiste tout au long de sa résidence au Tremblay, Benjamin Bianciotto sondera le mouvement chez Molinier, afin d’en révéler les jeux de reprises, de doubles et de variations, les « jeux de miroir » qui dessinent des parallèles musicaux. S’intéressant au rythme, il appréhendra la fascinante survenue de la symétrie dans l'œuvre photographique, en rupture avec la fluidité de ses dessins et peintures, un moyen d’ordonner le chaos, et de donner vie et une architecture stable à la monstrueuse et foisonnante création. L’étude, enfin, consistera à descendre dans la matérialité des œuvres, à scruter le squelette charnel au cœur du processus créatif.
Découpages, collages et montages photographiques s’apparentent aux techniques utilisées par la musique concrète. Elles métamorphosent le corps en instrument. Sous l'œil de Benjamin Bianciotto, Pierre Molinier se fait compositeur, assembleur du corps et de l’être cherchant à recréer une unité par la dissociation. Molinier n’est pas Dr. Frankenstein, mais expérimentateur sonore, contemporain des techniques et des revendications d’une musique révolutionnaire devenue classique, comme lui ; toujours inassimilable, insoluble, inclassable, comme lui.
(1) Michel Chion, Larousse de la musique, vol. 2, 1982, p. 1065.